Ce candidat revendiquerait une sensibilité clairement de gauche. Il ne serait pas contre l'économie de marché à condition qu'il croit encore possible que celle-ci puisse être régulée par la puissance publique. Il tenterait courageusement de s'attaquer au capitalisme financier qui ruine notre modèle social ou comme disent les communistes au "mur de l'argent" qui est l’un des pires maux de ce début de siècle.
En effet, depuis les Trente Glorieuses, on n'était plus habitué à un tel différentiel entre les riches et les pauvres. Il n'y pas si longtemps la différence entre le salaire d'un ouvrier ou d'un employé de base et un grand dirigeant d'entreprise était de 1 à 40. Cet écart s'est considérablement creusé de nos jours, de 1 à... 400 ! Je crois que c'est cela, fondamentalement, que la France rejette dans la mondialisation qu'elle trouve au final profondément inégalitaire voire injuste. Certains apparatchiks se taillent des fortunes considérables, comme en Russie ou en Chine et des millions d'autres personnes devraient rester sur le carreau. Parce que c'est la loi du marché ? Et c'est tout ?
Je ne crois pas que cette dérive à l'anglo-saxonne ressemble aux Français, ni ne leur convienne. Qu'on ne s'y trompe pas, l'électorat sarkosyste n'est pas libéral. Pour s'en convaincre, regardez les scores électoraux que faisait le parti libéral d'Alain Madelin. La France valorise le mérite individuel bien sûr. Mais l'idéal du bonheur est toujours vécu, en grande partie, sur le mode collectif, d'ailleurs toujours empreint d'une certaine idéologie collectiviste. On le voit, par exemple, à la survivance des nombreux partis qui se réclament de l'héritage communiste ou trotskiste. Même le parti socialiste rechigne à changer son nom. Le socialisme de Ségolène Royal n'a pourtant plus rien à voir avec celui d'un Jaurès ou d'un Léon Blum. Mais l’idéal demeure, au moins dans le nom.
A ce moment de la campagne, le débat porte sur l'identité nationale. Mais quelle est la nature de cette identité ? La question n'est pas anodine car elle touche aux fondements mêmes de notre nation et sa définition évolue en permanence. L'identité française est multiple, complexe et difficilement appréhendable dans sa globalité. C'est le vin, les fromages, le TGV, les services publics, la laïcité, l'heure de table, le droit grève, Jeanne d'Arc, Henri IV ou de Gaulle, Valmy, la prise de la Bastille, la nuit du 4 août, les droits de l'homme, Molière, Gavroche, Descartes, Jules Ferry et l'école obligatoire, les Lumières, le Louvre, la tour Eiffel, le mont Saint-Michel, l'apéro du dimanche, les marchés, le monument aux morts, le concorde, la sécu, la poste, la retraite par répartition... Tous ces éléments, ces personnages, ces idées, ces valeurs qui font que l'on partage un même mode de vie, une même histoire, les mêmes valeurs fondamentales et qui nous font sentir une communauté de destin.
Le bien commun, le "Vivre ensemble" est le grand absent de la campagne. Comme si la route vers le salut ne pouvait être qu'individuelle et corporatiste. Agiter un drapeau n'y changera rien, même après une coupe du monde remportée. Le mal est plus profond. Le Français est en perte de repère. Entre Vichy, la guerre d'Algérie, la décolonisation, la Françafrique, l'échec de l'intégration et le drame des banlieues, nous doutons de qui nous sommes, de l'avenir, de notre destin commun, de notre capacité à peser sur le cours des choses. Et c'est bien normal. Personne ne nous propose de réel projet de société. Entre le rejet illusoire d'un monde globalisé et la soumission aux règles de la concurrence la plus sauvage comme horizon unique, où est l'espoir, je veux dire l'espérance collective, et non pas la confiance individuelle en sa propre capacité à tirer son épingle du jeu, qui dépend largement de notre milieu d’origine ?
Pour faire revivre cet idéal collectif, et redonner du sens à des mots comme « Egalité » ou « Fraternité » qui font partie de notre devise, le candidat pour lequel j’aimerais voter identifierait les chantiers prioritaires suivants :
1) Les banlieues. C’est la priorité des priorités. Tout est à repenser en termes d’habitat, de transport, d’enseignement, d’intégration, de mixité sociale, de sécurité ou d’accès aux services publics. C’est un véritable Plan Marshall pour les banlieues dont le pays a besoin pour qu’il ne revive pas les émeutes de 2005 alors que se creusent chaque jour un peu plus les fractures entre les inclus et les exclus du système.
2) La réforme institutionnelle. Notre démocratie n’est plus représentative puisqu’un seul parti - l’UMP en l’occurrence - peut s’accaparer tous les pouvoirs sur une base de 20% des suffrages exprimés. Quatre candidats au moins peuvent prétendre se qualifier au second tour de la Présidentielle et tous auront besoin des réservoirs de voix des autres partis. La France refuse de se faire enfermer dans le bipartisme qu’on veut lui imposer. Faudra-t-il attendre comme en 2002 la présence de Le Pen au deuxième tour pour instaurer, par exemple, une vraie dose de proportionnelle aux élections législatives ?
3) La simplification législative et administrative. L’enchevêtrement de nos lois est trop compliqué et rend le système globalement opaque pour le non-initié. Les systèmes d’aides de toutes sortes sont devenus pléthoriques et contre-productifs. Les créateurs d’entreprises se plaignent constamment des lourdeurs administratives. La décentralisation a créé des doublons inutiles. C’est un grand chantier d’aplanissement et de simplification des textes qu’il faudrait entreprendre pour réduire les formalités, alléger les contraintes et gagner en transparence.
4) La relance de l’Union européenne, enfin. Le candidat pour lequel j’aimerais voter prendrait l’engagement ferme de lutter pour la réorientation de la politique européenne en vue de l’harmonisation des législations en matière sociale et fiscale. Une union forte et durable ne se fera pas contre les peuples et en dehors de leur adhésion. Le « Non » au référendum sur la Constitution doit être pris en compte. Car une Europe, véritablement démocratique et solidaire, reste le cadre où les grandes questions internationales, du réchauffement climatique au modèle de développement en passant par la politique énergétique, pourront un jour être traitées de manière efficace.
Il y aurait d’autres thèmes à traiter bien sûr, mais ces quatre priorités seraient, il me semble, de nature à réconcilier les Français avec le politique pour créer la confiance nécessaire à une dynamique collective et réformatrice.
mercredi 11 avril 2007
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2 commentaires:
Si ce candidat existait je voterai pour lui sans hésitation. Encore faudrait-il qu'il ait non seulement la croyance qu'il pourrait modifier les choses mais aussi le pouvoir d'agir efficacement avec les autres puissances européennes dans l'intérêt du plus grand nombre.Est ce utopique de le penser?
Je te reconnais bien là, et mieux, je me reconnais bien là
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