samedi 9 août 2008

Jeux de dupes

mardi 20 mai 2008

Yves Cochet, Pétrole Apocalypse, Fayard, 2005

« La hausse du cours des hydrocarbures ne sera pas un simple choc pétrolier, ce sera la fin du monde tel que nous le connaissons. »

Au vu du prix actuel du pétrole, c’est-à-dire très bon marché, cet été sera peut-être une des dernières occasions pour beaucoup de s’offrir un voyage sur un long courrier. Personnellement, j’ai réservé un circuit en Egypte pour le mois de septembre, et il m’en a déjà coûté une surtaxe « carburant » de 51 euros sur le prix initial. Bien entendu, le vendeur m’a prévenu, ce n’est qu’un acompte. Qui sait à combien sera le baril d’ici septembre…


Cette situation ne me surprend guère. La lecture du livre d’Yves Cochet –publié en 2005, une éternité !- m’avait déjà sensibilisé sur l’imminence de la crise pétrolière dont la situation actuelle n’offre qu’un léger avant-goût. Les marins-pêcheurs, les Tour Operators, les taxis, les routiers ont vraiment beaucoup de souci à se faire... Mais après eux, ce sera à la société toute entière de trinquer à son tour. Car le fondement même de notre civilisation – et de la mondialisation – repose sur un pétrole bon marché. C’est cette page de l’histoire du monde qui est en train d’être tournée. Nous rentrons dans l’ère du pétrole cher, voir très cher. Et c’est un choc sans précédent, surtout si on l’additionne aux autres chocs à venir, climatique et démographique…


Voici ce qu’écrit Yves Cochet en 2005 :
« Une simple poursuite de la tendance à la hausse observable depuis 2002 entraînerait un cours du baril à 100 dollars en 2008 (nous sommes déjà à 120 !), à 200 dollars en 2011. Et à 300 dollars en 2015 (…). »

Pour Yves Cochet, cela ne fait aucun doute: nous sommes devant l’imminence du « Peak Oil » ou « Pic de Hubbert », c’est-à-dire le moment fatidique à partir duquel la production mondiale de pétrole commencera à décroître inexorablement, entraînant un bouleversement sans précédent de notre mode de vie car il n’existe à l’heure actuelle aucune alternative énergétique. Sans compter que changer prend du temps. Ce choc imminent marquera la fin de l’ère du pétrole bon marché, une période qui aura duré 150 ans. Yves Cochet place ce pic très tôt, d’ici à 2 ans seulement, en 2010… Qu’il ait tort ou raison sur la date exacte, il y a urgence à mobiliser nos sociétés sur cette problématique.


Car les conséquences seront désastreuses pour l’Humanité : décroissance de la mobilité des humains et des choses, hausse sans précédent des prix des denrées alimentaires, famines, guerres énergétiques (songez à l’Irak et au Darfour)…


Pour retarder et atténuer ce choc, le remède
est à la fois simple et utopique : sobriété et décroissance de la consommation et des échanges pour économiser le pétrole encore disponible de manière à nous laisser le temps de bâtir les sociétés de basse consommation énergétique de demain. Mais quel dirigeant pourrait se permettre de tenir un tel discours alors que tous nous vendent encore la mondialisation comme une chance pour la planète ? Autant dire que la catastrophe est inévitable…

« Le slogan qui résume la philosophie des transports actuels est : Plus vite, plus loin, plus souvent et moins cher. Dans moins de quinze ans, il sera nécessairement : Moins vite, moins loin, moins souvent, et plus cher. »

samedi 12 avril 2008

« Maman »

Les promeneurs du jardin des Tuileries ont de quoi être surpris. Une gigantesque araignée de bronze et d'acier domine de ses 9 mètres de haut le joli parc dessiné par Le Nôtre. Rassurez tout de suite vos enfants, c’est du provisoire, elle retrouvera bientôt l'ombre d'une collection particulière new-yorkaise. En attendant, le Centre Pompidou consacre jusqu’au 2 juin une exposition à sa créatrice Louise Bourgeois, une artiste française installée à New York depuis 1938. L’immense sculpture arachnéenne était tout simplement trop grande pour le musée d’art moderne.


Chose curieuse, pour Louise Bourgeois, qui fait des araignées monumentales depuis les années 90, cet animal est une figure bénéfique. Elle l’associe à l’image de sa mère, rassurante et protectrice, en opposition à celle de son père, tyrannique et volage, qu’elle détestait.

Pour en savoir plus en 1'44'' et en video, cliquez ici.

vendredi 11 avril 2008

Anselm le généreux

Je manque décidément à tous mes devoirs. Non seulement je n’alimente ce blog qu’épisodiquement mais j’omets en plus de commenter des infos majeures concernant le Louvre. Il en est ainsi du nouveau décor commandé à Anselm Kiefer, pourtant inauguré le 25 octobre 2007 et que j’évoquais déjà ici. Sans doute parce qu’il n’y a pas à s’insurger. Pour tout vous dire, je m’attendais à pire. Du genre de l’exposition Jan Fabre qui se tient en ce moment. Mais je vous en parlerai plus tard.

Cette commande s’inscrit dans la nouvelle politique qu’a le Louvre depuis 2003 en direction de l’art contemporain et qui a pour but de « donner un caractère officiel et patrimonial à la création contemporaine, de faire découvrir à un large public non initié les créations des artistes d’aujourd’hui et d’affirmer le caractère universel du musée. » Rien de moins.

"Athanor"

Anselm Kiefer, « artiste vivant de renommée internationale » comme le souligne ostensiblement le dossier de presse, l’a bien compris et a même généreusement livré trois œuvres pour le prix d’une. En effet, non content de réaliser un décor monumental (celui qu’on lui a demandé), l’artiste a en plus produit deux sculptures que je vous laisse admirer. Il faut savoir apprécier, bien sûr…

"Danaé"

"Hortus conclusus"

Pour ceux qui ne parlent pas latin ou qui cherchent le rapport avec la mythologie grecque, je vous renvoie au dossier de presse où la signification de chaque œuvre est doctement expliquée.

Quant au décor principal, il est empreint d’une forte symbolique alchimique (le titre « Athanor » désigne le nom du four permettant de fabriquer la pierre philosophale) et possède, comme souvent dans l’art contemporain, une dimension narcissique puisque l’artiste s’est représenté lui-même en homme couché faisant de la méditation.


Selon mes sources, cette bagatelle a tout de même coûté la somme de 600 000 euros dont 500 000 sont directement allés dans la poche de l’artiste. Mais que le contribuable se rassure: cela n’a rien coûté au Louvre (comme d’habitude) puisque tous les frais on été pris en charge par le mécénat d’AGF (qui affichait 2 milliards d’euros de bénéfices en 2006). Vous trouvez ça cher ? Pourtant, le Louvre a fait une très bonne affaire et un bon placement. Car Kiefer lui a fait un prix d’ami… Et oui, sur le marché de l’art, chacune de ces trois œuvres vaudrait à elle seule les 500 000 euros !

Les prochains artistes à intervenir au Louvre devraient être Cy Twombly pour le plafond de la salle des bronzes antiques (là, on parle d’au moins 2 millions d’euros) et François Morellet pour l’escalier Lefuel. Gageons qu’ils seront aussi généreux que Kiefer ! Allez, trois plafonds pour le prix d’un, payés par Bolloré, ça devrait être possible au royaume de Sarkozy !

samedi 22 mars 2008

Attention, week-end de Pâques !

Pour ceux qui auraient l'intention d'aller faire un tour au Louvre en ce week-end de Pâques qui s'annonce particulièrement mauvais, voilà à quoi ressemblait l'affluence dès vendredi matin ! Vous êtes prévenus, la saison est lancée. Le Louvre va-t-il franchir la barre des 9 millions de visiteurs cette année ? C'est possible... En tout cas, il devient difficile de trouver de bonnes conditions de visites dans cette Babel moderne. A noter: une très belle exposition sur "Babylone" justement. Dépêchez-vous d'aller la voir avant qu'elle soit blindée !

vendredi 15 février 2008

Le déni écologique

« La croyance dans la régulation des prix par le marché et la foi en la science et la technologie pour résoudre des problèmes « conjoncturels » d’accès à des ressources énergétiques bon marché constituent deux certitudes de la pensée libérale-productiviste, la plus communément partagée dans le monde d’aujourd’hui. La présentation de faits, de nombres, d’informations et de raisonnements qui les contredisent rigoureusement est rarement prise en considération par les gardiens de ces certitudes. Ceux-ci sont d’abord les économistes néoclassiques, qui règnent dans les universités et les médias, suivis par les chefs d’entreprise et la majorité des politiciens, deux groupes qui semblent devenir de plus en plus interchangeables, comme le montre la composition des gouvernements, et notamment les nominations au poste de ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. Il est fait appel de façon croissante à des businessmen patentés pour prendre en charge ce ministère ou conseiller son occupant énarque. Réciproquement, les hauts politiciens retirés de la politique ou remerciés trouvent souvent de confortables replis dans quelque grande entreprise. Cet échangisme existe aussi au sein de la technocratie d’Etat (énarques, polytechniciens…), où il est banal de rejoindre le privé après des années de direction d’administration. Cette population est d’ailleurs remarquablement structurée, collectivement en groupes d’anciens élèves des grands corps, et individuellement en tant qu’esprit formés à l’organisation des personnes, des choses et des évènements. Formés à l’organisation, mais pas à l’observation. A la décision, mais pas à la science. L’histoire du changement climatique le montre à l’envi.
Alors que depuis plus de trente ans les scientifiques et les écologistes tentent d’alerter les milieux économiques et politiques sur les risques liés à l’augmentation de la concentration de gaz à effet de serre, il a fallu attendre l’année 2005 pour que le modeste Protocole de Kyoto entre en vigueur – sans parler du temps qu’il faudra pour qu’il s’applique réellement- et que le gouvernement français rédige un indigent « plan climat ». Le problème et sa solution sont pourtant étonnamment simples à exposer : le gaz carbonique émis par la combustion des fossiles étant le principal contributeur au changement climatique , il est indispensable de réduire celle-ci. Ce qui n’est pas fait. Car la science, la réalité chimique de l’atmosphère se heurtent frontalement aux croyances productivistes de nos dirigeants économiques et politiques, qui y opposent un déni tenace . Elles se heurtent aussi aux habitudes les plus banales de milliards d’individus dont la vie quotidienne repose sur des produits carbonés, depuis le carburant pour la voiture jusqu’aux médicaments et aux vêtement synthétiques. Nos gouvernants n’ayant pas agi à temps, nous connaîtrons des épisodes géophysiques extrêmes de plus en plus meurtriers. Ce sont nos propres enfants que notre mode de vie matériel met en danger de mort, et non ces abstraites « générations futures » sans cesse évoquées par nos dirigeants, notion impersonnelles et floue qui leur permet de repousser toujours à plus tard les décisions politiques radicales qui devraient être prises. »

Yves Cochet, Pétrole Apocalypse, Fayard, 2005, p. 119-121.

mardi 5 février 2008