En cette fin de campagne, je suis frappé que la plupart de nos commentateurs politiques aient intégré que la France était un « petit pays, même en Europe » et que son président, fraîchement élu, n’aura de toute façon aucune capacité d’action ! D’ailleurs, par suivisme ou par paresse intellectuelle, ce qui revient au même, ils ne proposent que la fusion dans le moule du marché mondial ou prédisent l’effondrement.
Heureusement pour eux, d’autres pays n’ont pas cet état d’esprit.
L’Equateur, par exemple, se rebelle. Le président Correa a réussi son pari et emboite le pas à Evo Morales, son homologue bolivien. Lundi, il a gagné son référendum. Une large majorité de votants ont répondu "Oui" à « la convocation d'une Assemblée constituante aux pleins pouvoirs afin qu'elle transforme le cadre institutionnel de l'Etat et élabore une nouvelle Constitution".
Car, Rafael Correa, économiste de formation (il a étudié en Equateur, en Belgique et aux Etats-Unis), veut en finir avec le « néolibéralisme déprédateur » et l’impérialisme de son puissant voisin américain. Certains agitent le spectre de Chavez, quand ce n'est pas celui de Castro pour mettre en garde contre une éventuelle dérive dictatoriale. Honnêtement, je ne connais pas assez la politique équatorienne pour exprimer un avis là-dessus. Je m'en tiendrais donc aux discours. Que veut Correa ?
Le président équatorien souhaite un «changement de modèle économique selon lequel l'Etat planifie, régule et assure la promotion de l'économie sans nationaliser les moyens de production». Il propose notamment :
- la renégociation des contrats avec les sociétés des secteurs de l'électricité, des télécommunications et surtout du pétrole.
- la restructuration de la dette extérieure.
- le non-renouvellement de l'accord qui permet aux Etats-Unis d'utiliser la base militaire aérienne de Manta.
- le refus des ingérences des institutions financières internationales.
- l’interdiction des monopoles notamment dans le secteur bancaire.
- un investissement massif de l’Etat en matière d’éducation et de santé.
En outre, le dollar américain restera monnaie de l'Equateur.
Pour autant que je sache, c’est ce genre de politique interventionniste qui a réussi en Corée, en Malaisie ou en Thaïlande avant que la libéralisation forcée de leurs marchés de capitaux ne les conduisent à la crise et une des rares efficace pour un pays qui veut réussir sa transition économique.
Rafael Correa a également déclaré qu'il expulserait du pays le représentant de la Banque mondiale, Eduardo Somensatto, si une enquête en cours confirmait que cette institution a bloqué, en représailles à des mesures défavorables aux multinationales pétrolières, un prêt de 100 millions de dollars octroyé à l'Equateur. Et ça, c’est plutôt rigolo !
Alors, au lieu de gloser sans fin sur son déclin, la France de l'impuissance ferait mieux de s’inspirer de ce « petit pays » qui ne désespère pas, lui, de prendre son destin en main. Ne confondons pas "capacité d'action" et "volonté d'action". Et souhaitons bonne chance à l'Equateur !
Ceux qui veulent aller plus loin, et comprendre les circonstances qui ont amenées en janvier 2007 M. Correa au pouvoir, pourront se référer à cet article du monde diplomatique.
mercredi 18 avril 2007
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